Fille du Peuple...

" Les hommes font l'histoire, mais ne savent pas l'histoire qu'ils font. " Karl Marx

dimanche 9 février 2014

Les Palestiniens, un peuple - Les prémices du conflit palestinien...




1891. Sous la férule ottomane, Juifs et Arabes coulent encore des jours heureux dans la province ottomane de "Syrie" (future Palestine). Juifs, chrétiens et musulmans sont égaux au sein de l'empire ottoman. Jérusalem, la plus grande ville du pays, a un caractère cosmopolite plus prononcé que partout ailleurs avec ses communautés religieuses françaises, britanniques, arméniennes, italiennes...Quarante mille Juifs vivent dans la ville sainte auprès de vingt mille Arabes, et chacun, peut circuler librement dans les quartiers musulmans, chrétiens, juifs, arméniens. Le libre accès aux lieux saints est garanti à tous.


Mais en Europe, l'antisémitisme secrète peu à peu le sionisme qui engendrera le problème palestinien. L'antisémitisme politique se développe en Allemagne et en Autriche. Les Russes rejettent sur l'ensemble des communautés juives la responsabilité de l'assassinat d'Alexandre II, en 1881. Le poison se met alors à dévorer l'Europe : pogroms russes, persécutions des Juifs en Pologne et Roumanie, Affaire Dreyfus en France...De nombreux juifs, fuyant ce cauchemar, se réfugient alors dans le sionisme. En 1896, Théodore Herzl, journaliste viennois, appelle les Juifs à créer un état en "Palestine". En 1897, se tînt le 1er congrès sioniste à Bâle, marquant la naissance officielle du mouvement sioniste : "l'objectif final du sionisme est de créer, pour le peuple juif, un foyer en Palestine, garanti par le droit public".
En "Palestine", les colonies juives, dynamiques, se multiplient : elles achètent de nombreuses terres appartenant aux ancêtres des Arabes. Ces derniers, d'abord indifférents, commencent à s'agiter et s'éveiller...

Le 24 juin 1891, les notables de Jérusalem protestent et demandent à ce qu'un décret soit publié interdisant aux Juifs d'acheter leur terres....Constantinople accepte, mais les britanniques le stoppe immédiatement. En 1908, est créé à Haïfa le journal "al Karmel" chargé de dévoiler les visées sionistes et les achats des terres par les colons. Puis ces questions se trouvent posées au nouveau Parlement ottoman en 1909 : il faudra alors attendre 2 années pour voir les 1ères organisations politiques de lutte contre le sionisme se créer à Haïfa et à Jaffa. D'ailleurs, certains dirigeants de la communauté juive palestinienne partagent cet antisionisme.

Puis la Grande guerre annonce la fin d'un certain ordre mondial dont la Palestine ne sera pas épargnée.

L'empire ottoman entre dans le conflit le 02 novembre 1914. La guerre surprend cette province de "Syrie" en pleine mutation et la peur du changement s'est installée parmi les Arabes. Se développe un ressentiment pour ces colons d'un genre nouveau, qui se mettent à parler hébreu. Le nationalisme arabe devient de plus en plus inconciliable avec le sionisme. Parallèlement, les Alliés, au gré de leurs intérêts, passent d'une politique à une autre, semant amertume, déception, haine et rancœur dans cette province. Les grandes promesses d'indépendance n'aboutiront qu'à un dépeçage engendrant une nouvelle forme de colonisation baptisée "mandat".

En 1915, le gouvernement britannique, par son émissaire Mc Mahon, promet au "chérif" Hussein de la Mecque, que la province sera comprise dans le royaume arabe indépendant à venir. Mais parallèlement, la France veut préserver sa présence au Proche-Orient. Sont alors signés, entre les deux gouvernements, en mai 1916, les accords Sykes-Picot qui placent, plus ou moins directement, le Liban et la Syrie d'aujourd'hui sous influence française, puis l'Irak et la Transjordanie sous influence britannique. Quant à la "Palestine", elle sera placée sous une administration internationale le temps que des accords sur la forme soient trouvés entre Alliés, Russes et Arabes. Mais la Grande-Bretagne aura, tout de même, les contrôle direct des ports de Haïfa et d'Acre.

La pression des sionistes de Grande-Bretagne, alliée à la nomination de Sir Arthur James Balfour, sympathisant de la cause juive, au Foreign Office, justifient le besoin du gouvernement britannique d'asseoir son assise dans cette partie du Proche-Orient, malgré les "promesses" ayant pu être faites auparavant...La "Déclaration Balfour" (lettre dactylographiée, approuvée, à l'origine de la création de l’État d'Israël) du 02 novembre 1917, en sera l'accomplissement. Français, italiens et américains la reconnaîtront ensuite. Les juifs, en 1917, ne représentent que 7% de la population de la "Palestine" et pourtant, les Arabes ne seront aucunement consultés sur cette Déclaration. Malgré que les Arabes se soient rangés du côté des Alliés (leur ayant promis l'indépendance), leur colère monte et gronde. L'indépendance si chèrement promise ne semble plus d'actualité.

Puis 1920, "l'année de la catastrophe" survient. L'empire ottoman est vaincu et il s'agit pour les occidentaux de régler définitivement le sort des anciennes province ottomanes. Le 25 avril 1920, le Conseil Suprême des Alliés, réuni à San Remo décide que la Palestine (Jérisalem et Sud-Syrie) et la Mésopotamie reviennent à la Grande Bretagne tandis que la France obtient le Liban et la Syrie. C'est une victoire pour les sionistes : le mandat sur la Palestine fait obligation aux Britanniques d'appliquer la Déclaration Balfour. En juillet 1922, le Conseil de la Société des Nations approuve définitivement le texte de ce mandat qui évoque, notamment, dans son article 2 : "le Mandataire assumera la responsabilité d'instituer dans le pays une situation politique, administrative et économique de nature à assurer l'établissement du foyer national pour le peuple juif...". Les fondations de l’État d'Israël sont jetées ! L'indépendance est alors déniée aux Palestiniens. En 1922, les puissances mandataires signent à Beyrouth un accord bousculant les frontières actuelles, qui sera approuvé par la SDN en 1924. L'occidentalisation de la "Syrie" est en marche : le nationalisme arabe s'en nourrit et la contestation va se manifester politiquement ainsi que dans la rue.

Des associations islamo-chrétiennes commencent à se former et à devenir le foyer de la contestation palestinienne.(distributions de tracts, conférences, congrès...). L'opinion palestinienne commence à être informée du "danger sioniste". Les différents congrès palestiniens qui se tiendront, auront pour mission de dénoncer la politique du mandataire (britannique) visant à appliquer la Déclaration Balfour, de refuser l'immigration juive massive, et de former un gouvernement palestinien représentatif et indépendant : la "Syrie du Sud" doit devenir la Palestine...

En 1922, Winston Churchill, soumis aux pressions des Arabes et des Juifs, tente d'apaiser les esprits et justifier sa politique par l'exposition le 30 juin, à l'intention des Juifs, de son "Livre Blanc". En vain, un nouveau déboire pour le Président et une nouvelle déception pour les palestiniens.

Entre alors en scène une personnalité qui va jouer un rôle de 1er plan dans le mouvement national palestinien : il s'agit de Hadj Amine al Husseini, devenu mufti de Jérusalem (et dans les faits mufti de Palestine...) puis Président du Conseil Suprême Musulman qui officie en matière politique, juridique (nomination des juges musulmans) et administrative (gestion des revenus des biens religieux, des écoles, des hôpitaux...). Il deviendra le symbole de l'opposition au sionisme et au mandat britannique. Il sera à l'origine du boycottage des élections de 1922 pour le conseil législatif britannique. Il voyagera beaucoup afin de faire entendre à tous la voix des opprimés. Mais en vain : ni les délégations, ni les pétitions, ni le boycottage, ni les grèves, ni les émeutes n'arrivent à faire obstacle à la politique britannique et à l'implantation sioniste.

Cet échec s'explique par plusieurs facteurs :
1/ Les Palestiniens n'ont compris que tardivement, qu'il s'agissait de promesses bafouées. 
2/ Structure féodale et patriarcale de la société palestinienne : Le pouvoir est entre les mains d'une petite aristocratie foncière (la caste des effendis) au sein de laquelle des grandes familles (Husseini...) sont plus préoccupées par leurs rivalités et par la défense de leurs intérêts. (les effendis tirent de gros revenus de l'usure et de leurs domaines cultivés par les fellahs). Ces grandes familles exercent une influence considérable dans la vie politique et jusque dans les petits villages : tout parti politique (autre que le parti communiste) émane de l'un de ces clans.

Et au bas de l'échelle sociale se trouvent les fellahs, 1ères victimes de la colonisation sioniste et des rivalités des grandes familles palestiniennes. En 1922, ils représentent 71% de la population arabe. Fortement endettés envers les effendis, ils connaissent des années noires. Attirés par la spéculation foncière, les propriétaires palestiniens augmentent leurs loyers (les paysans s'endettent alors) ou vendent leurs propriétés aux organisations sionistes (les paysans perdent alors leur travail car non employés par ces mêmes organisations). Les bidonvilles d'Haïfa grossissent....Peu informés de ce qui se passe au plus haut niveau politique, leur volonté d’auto-préservation et leur inquiétude face à leurs terres travaillées par d'autres, sont  à l'origine des différentes émeutes ayant eu lieu en 1921 puis plus tard également.

E.L

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